Vers un changement ?
« Au nom de la planète et en faveur de l'écologie »
Comme susmentionné, les sympathisants et fervents défenseurs du « bien-être de la planète » à travers l'histoire sont légion (entendons « de la cause écologique » pour nos contemporains). A chaque époque ses prises de conscience, ses mises en œuvre pour un monde pensé plus juste et ses combats… D'ailleurs, parallèlement au concept d'écologie s'étoffe une certaine rhétorique de plus en plus variée et complexe, évoluant au gré des changements profonds de nos sociétés ! Et dans la foulée, cette complexité rejaillit sur la thématique préoccupante qu'est le dérèglement climatique ! L'heure est à l'inquiétude. Les dirigeants de ce monde, la sphère scientifique et les climatologues, ainsi que les experts en tous genres tirent la sonnette d'alarme : il faut agir, trouver des solutions, réévaluer nos modes de vie et apprendre à vivre avec et pour les autres…On nous parle notamment de « transition écologique ».
Dans le Trends Tendance du 14 juillet 2022, une tribune était accordée au romancier, essayiste et consultant Paul Vacca. Ses propos sur la transition écologique soulignaient les faits suivants: « (…) comment lutter contre l'inertie sociale ? Face à l'urgence, la colère monte chez les militants mais aussi tous ceux qui se préoccupent de l'avenir. Il faut frapper un grand coup, marquer les esprits, sans quoi rien ne bougera (…) On connaît les mécanismes de résistance face aux arguments qualifiés parfois d'apocalyptiques alors qu'ils ne sont souvent que « réalistes » (…), susciter la panique engendre souvent l'effet contraire à celui escompté : face à la menace, la plupart des personnes ont tendance à être soit dans le déni (…) soit dans l'évitement. (…) »[1]
« La transition écologique – le bilan wallon sur ses engagements concernant le développement durable »
« La Transition est un mouvement d'initiatives visant à assurer la résilience d'une communauté, c'est-à-dire sa capacité à continuer de fonctionner malgré des crises économiques et/ou écologiques extérieures. C'est l'enseignant anglais en permaculture, Rob Hopkins, qui, le premier, en 2005, théorise le concept de "transition écologique". »[2]
En Wallonie, cette transition se base notamment sur le développement durable[3]. Le SPW (Service Public Wallonie) met en exergue le territoire (« ici et ailleurs ») et la pérennité pour les générations futures ! Tout comme il semble évident de rappeler qu'une société « (…) se développe durablement si les activités qu'elle initie concilient de manière intégrée et équilibrée les aspects économiques, environnementaux et sociaux »[4]. Ces trois piliers sont interdépendants ! La Déclaration de Rio de 1992 définissait les cinq principes du développement durable en insistant sur divers aspects tels que l'interdépendance de l'économie, l'environnement et la cohésion sociale, la mobilisation, les droits de tout un chacun, la solidarité, etc.
En septembre 2015, la Wallonie a engagé sa responsabilité en dix-sept objectifs de développement durables (« O.D.D. ») à atteindre à l'horizon 2030. Ils concernent notamment le bien-être, la santé, l'éducation, l'eau, les énergies vertes et renouvelables, l'industrialisation durable favorisant le plein emploi, l'égalité des sexes, la consommation responsable, la préservation de la faune et de la flore ainsi que du patrimoine, etc. « Chaque stratégie a fait l'objet d'une évaluation dans sa mise en œuvre et deux bilans des progrès de la Wallonie vers les 17 ODD ont été réalisés depuis 2017 [5]». Le dernier rapport du bilan de la Wallonie [6] a été publié en 2020.
Les derniers rapports du GIEC
Créé en 1988 par l'Organisation Météorologique Mondiale et le Programme des Nations Unies pour l'Environnement, le GIEC (Groupe d'experts Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat), « (…) a pour mission de rendre compte de l'état des connaissances scientifiques relatives à l'évolution du climat mondial, ses impacts, et les moyens de l'atténuer[7] ». Des rapports d'évaluation sur l'état des changements climatiques sont produits à intervalles réguliers. Les plus récents concernent la période couvrant les années 2021-2022. C'est sur base de ces rapports, et sous l'égide de la Convention-cadre des Nations-Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC) et des du Protocole de Kyoto que se négocient les accords internationaux…
Le Collectif « Pour un réveil écologique » associé à des auteurs et autrices du groupe 2 du GIEC ont synthétisé les points importants de ces rapports. Le premier volet concerne les bases physiques du climat, le deuxième ; les impacts, adaptations et vulnérabilités et le dernier énonce des possibilités et/ou des solutions qui pourraient permettre la réduction des émissions… Il est déjà reconnu que les bouleversements climatiques qui nous touchent semblent irréversibles, néanmoins, des solutions pour tenter de freiner le processus et y faire face sont proposées.
Dans le cadre de ce focus, nous accordons une attention plus particulière aux propositions relevant de l'écologie ! Il est désormais évident pour l'ensemble des acteurs luttant contre ce réchauffement climatique, que nos modes de vie doivent changer fondamentalement ! Il est encore admis que les énergies renouvelables, la mobilité électrique (très controversée en raison d'une crise énergétique sans précédent) et les bâtiments dits « bas carbones » sont autant de défis technologiques et physiques vers lesquels les sociétés semblent « penser » s'orienter.
Une série de propositions accompagnent également ces solutions d'actualité : réduire les longs déplacements par air et par voies d'eau, favoriser un écotourisme qualitatif et en adapter les coûts, sortir des énergies fossiles et réévaluer les possibilités transitoires et les solutions de remplacements réalisables, mettre fin à la déforestation intensive et, parallèlement, veiller à restaurer et à pérenniser autant que possible les écosystèmes pour l'équilibre faune-flore, économiser l'eau si précieuse et développer pour « universaliser » un système de désalinisation de l'eau de mer pour que vive l'agriculture, privilégier la qualité de l'air, revoir nos modes de consommation, nous réhabituer à des régimes alimentaires moins carnés,…
Des solutions ont été actées lors du dernier GIEC ! Les propositions sont exhaustives et souvent, coûteuses pour leur mise en œuvre. Mais elles ne sont pas impossibles à concrétiser. Sommes-nous prêts à tant de « sacrifices » et surtout à quel(s) prix ?
« Errare humanum est, sed perseverare diabolicum » [Sénèque le Philosophe / saint Augustin / Cicéron]
« L'erreur est humaine, persévérer dans son erreur est diabolique ». La nature humaine est complexe et imprévisible. Mais l'homme a aussi cette capacité d'adaptation. Et l'adage dit également « Qui ne tente rien, n'a rien ». Les initiatives pour un monde meilleur existent. Et, la plupart du temps, elles émanent de collectifs citoyens ! Au moment où nous écrivons ces lignes, le festival « M ! » (« Maintenant ! – Le Festival Citoyen Pour un Monde en Transition ») s'ouvre au tout public, à Louvain-La -Neuve. Sa première édition a eu lieu en 2018. Le festival est l'aboutissement d'un débat d'idées entre amis et sa création a germé en 2016, un an après la sortie du film Demain de Cyril Dion[8] ! « (…) Après 4 années d'existence, ce sont aujourd'hui une soixantaine de citoyen.ne.s bénévoles qui s'impliquent durant l'année, soutenus par un mi-temps salarié. Sous le « label » Maintenant!, l'ambition est de développer non seulement un grand rendez-vous à l'automne, mais également des activités durant l'année, ainsi qu'un travail de communication renforcé. »[9] Le festival est soutenu par de nombreuses associations/organisations impliquées, d'une manière ou d'une autre, dans des causes liées à l'humain et l'écologie : Oxfam, Rencontre des Continents, Les Amis de la Terre, Terre en-vue, Réseau Transition.be, Agroecology in Action,…
Au programme : des ateliers participatifs, des spectacles, des projections de films et de documentaires, des conférences…
Les réseaux sociaux ont également un rôle de vulgarisation. Quand ils sont utilisés à « bon escient », ils remplissent une mission informative et facilitent une participation pouvant servir un certain progrès collectif pour celles et ceux qui souhaitent s'investir. De nombreux groupes permettent ainsi aux citoyens lambda de se retrouver et surtout, de s'identifier à des causes qui leur sont chères ! Facebook, entre autres, offre ces occasions à travers des initiatives citoyennes telles que « La Permaculture en Terre Belge » (13.000 membres), « La Permaculture et les Eco-constructions : L'Avenir » (10.000 membres), « Mon Jardin en Permaculture » (Site Internet éducatif – 192.000 membres) et tant d'autres ! La liste est exhaustive.
Le secteur du tourisme n'est pas en reste ! « Eco-tourisme », « Tourisme vert » et bien d'autres appellations convergent aujourd'hui vers des idées communes visant à protéger l'environnement tout en soutenant une économie locale. En 2017 déjà, le journal Ouest-France dans « L'Edition du Soir », mettait en exergue ce type de tourisme et listait les pays soucieux de protéger leur patrimoine et population en limitant le tourisme de masse. Au sein de l'Union Européenne, l'Italie, le Portugal, l'Espagne et la Croatie tiraient la sonnette d'alarme alors qu'ailleurs ; et à titre d'exemple, le Bhoutan, le Rwanda, la Polynésie française et la Jordanie avaient déjà limité les cadres dans lesquels ils acceptaient et géraient la masse touristique tout en se félicitant des bienfaits de ces décisions ainsi que les retombées écologiques et économiques ![10]
En Belgique, tant en Wallonie qu'en Flandre, « le tourisme vert » n'en est pas à ses premiers balbutiements. Dans la publication « Vive les Vacances – Des premiers voyages d'agrément au tourisme pour tous » du Musée de la Vie wallonne, éditée parallèlement à l'exposition éponyme en 1997, le phénomène s'explique comme suit : « (…) Avec l'arrivée de nouveaux vacanciers, le XXème siècle voit apparaître de nouvelles formules centrées sur les activités de plein air. A l'agencement de plages au bord de lacs et de rivières s'ajoute la création d'aires de détente où les sports nautiques sont favorisés. Le camping, nouvelle manifestation des vacances nomades, est en plein essor. Assurant une plus grande mobilité et une immersion directe dans la nature, il a aussi l'avantage d'être plus économique[11]. »
Plus proche de nous, l'exemple d'Intradel de ses partenaires et soutiens, mérite d'être cité ! De nombreuses publications résultent des initiatives participant à un monde « plus propre ». Le kit « Mon Zéro Déchet » propose aux citoyens de se former à la perspective en prenant part aux solutions visant le bien-être et le respect de la collectivité. L'aspect plutôt pédagogique se décline en 6 thématiques invitant à la lecture de fiches « tuto » richement illustrées. Et les exemples foisonnent sur les thématiques liées à l'écologie. On trouve également un Guide du réemploi, Le Jardin zéro déchet, Moins de pesticides, moins de déchets spéciaux et moins de pollution…, Mon Frigo zéro gaspi,…
Une collecte sur la transition écologique pour étoffer nos collections…
S'il est un sujet délicat à traiter dans le cadre des missions qui incombent au Musée de la Vie wallonne, c'est sans doute l'écologie. Pas seulement parce qu'il y a matière à la digression, mais parce que la thématique est en perpétuelle évolution et aussi, parce qu'elle se construit sur des débats opposants les uns et les autres tout comme elle s'éloigne des acteurs qui la fédéraient autrefois. L'avenir pourrait s'annoncer plus inquiétant que rassurant, personne ne peut le nier. Nous traversons des crises profondes et nos excès ont généré des conséquences aux effets irréversibles…
Mais dans ces scénarios catastrophes, il est aussi important de poindre ces initiatives qui, un jour, laisseront une trace et seront certainement citées comme des points d'ancrage de l'histoire pour les générations futures. C'est également dans ce but que le Département des collections du Musée a récemment lancé un appel aux dons via une collecte consacrée à la « transition écologique », afin de compléter tant nos archives, nos fonds photographiques que nos réserves d'objets.
En guise de conclusion, notre collecte s'inscrit dans la démarche suivante « L'appropriation des grands thèmes écologiques (le tri, le recyclage, l'appauvrissement de nos ressources, l'abandon de l'énergie nucléaire…) est amenée à transparaître au sein de nos collections. À l'inverse, les productions en lien avec le tout jetable, la diffusion massive du plastique illustrent aussi des comportements dont notre société éprouve des difficultés à se défaire. L'importance du recyclage dans nos déchets reste minime, même si certaines entreprises en font leur business. Dès lors, des objets anciens qui montrent le réemploi dont faisaient usage nos grands-parents et qui reviennent en force avec les repair cafés constituent une approche pertinente pour notre collecte [12]. »
Une partie de cette collecte est déjà visible sur notre catalogue en ligne : http://collections.viewallonne.be?queryid=2e0c60ca-e631-4985-87cc-6abf82e0c954
Vos propositions de don peuvent être envoyées à l'adresse suivante : centrededocumentation@viewallonne.be
Jean-Michel Stockem, Collaborateur aux Archives générales du Musée de la Vie wallonne
Légendes des illustrations :
- 1. Brochure informative et pédagogique sur la valorisation des déchets de jardin et la préservation de la nature. ("Magazine antigaspi et antidéchets"), 2022.
- 2. Autocollant édité dans le cadre d'une campagne de prévention visant la propreté des cours d'eau et de la mer, 2021.
- 3. Dépliant informatif et pédagogique sur le traitement préventif par la « culture associée », 2022.
- 4. Affiche du Festival « Maintenant ! », Edition 2022 (Copyright © 2021 – ASBL Terre ouverte)
- 5. Photographie extraite de la galerie photos du Festival « Maintenant ! », Edition 2022 (Copyright © 2021 – ASBL Terre ouverte)
- 6. Photographie extraite de la galerie photos du Festival « Maintenant ! », Edition 2022 (Copyright © 2021 – ASBL Terre ouverte)
- 7. Panneau de récupération en carton, utilisé lors de la marche pour le climat à Bruxelles, le 10 octobre 2021.
- 8. Affiche promotionnelle pour l'Université d'été ClimActes, Transition écologique et solidaire, édition 2022.
- 9. Autocollant apposé sur les vitres des salons de coiffure participant au projet "Hair Recycle" porté par l'asbl Dung Dung, 2022.
- 10. Tract de l'association Stop Alibaba & co protestant contre l'extension de l'aéroport de Bierset et l'arrivée de la société Alibaba et appelant à une mobilisation des citoyens à l'occasion des enquêtes publiques organisées par Liège Airport.
[1] Paul VACCA, « Transition écologique : le casse-tête rhétorique » » dans Trends Tendances, n°28/29, 14 juillet 2022, p.18
[2] Pour la Solidarité [En ligne] https://www.transition-europe.eu/fr/page/definitions-2 (Consulté le 18/08/2022)
[3] Sur la page du SPW https://developpementdurable.wallonie.be/17odd (Consulté le 01/09/2022), le développement durable est défini comme « (…) un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre à leurs propres besoins ».
[4] Wallonie Service Public SPW [En ligne] https://developpementdurable.wallonie.be/17odd (Consulté le 01/09/2022)
[5] Wallonie Service Public SPW [En ligne] https://developpementdurable.wallonie.be/17odd (Consulté le 01/09/2022)
[6] Version pdf https://developpementdurable.wallonie.be/sites/dd/files/2019-12/SPW%20-%20Rapport%20indicateurs%20ODD-Synthetique_2.pdf
[7] Rapport Du GIEC [En ligne] https://climat.be/changements-climatiques/changements-observes/rapports-du-giec (Consulté le 01/09/2022)
[8] Film documentaire français de Cyril Dion et Mélanie Laurent, sorti en 2015.
« Devant un futur que les scientifiques annoncent préoccupant, le film a la particularité de ne pas donner dans le catastrophisme. Adoptant un point de vue optimiste, il recense des initiatives dans dix pays, face aux défis environnementaux et sociaux du XXIe siècle, qu'il s'agisse d'agriculture, d'énergie, d'économie, d'éducation ou de gouvernance » (Wikipédia)
[9] Festival Maintenant ! [En ligne] https://www.festivalmaintenant.be/le-festival-maintenant-2/ (Consulté le 22/09/2022)
[10] Ouest-France, L'Edition du soir du 17/08/2017 [En ligne] https://www.ouest-france.fr/leditiondusoir/2017-08-17/ces-pays-qui-refusent-le-tourisme-de-masse-6733bb96-6b63-45c5-8a6b-6a364aa16aea (Consulté le 22/09/2022)
[11] Marie-Claude THURION, «Vive les Vacances – Des premiers voyages d'agrément au tourisme pour tous », Liège : Province de Liège, 1997 (Musée de la Vie Wallonne), p.21
[12] QUOILIN Cécile, « Les collectes du Musée de la Vie wallonne », dans Chronique des Amis du Musée de la Vie wallonne, Liège, 2021, p.12-14.